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ÉVREUX
IMPRIMERIE CHARLES HÉRISSEY
PAUL HÉRISSEÏ SUCC'
4,
KHE DE LA BANQUE. 4
1922 ?.
JEAN-THÉOPHILE-GUSTAVE
CHAIX D'EST-ANGE
1863-1923.
L'auteurde ce XVIIIe volume n'aura pas eu son plaisir accoutumé
de le distribuer lui-mêmeà amis, lecteurs fraternels associés
ses aux
à son labeur dans des recherches communes, auxquels il apportait,
enquête de premier ordre, mine aussi précieuse qu'iné-
par une une
puisable d'informations.La mort l'a surpris brutalement milieu de
au
son œuvre, dans sa pleinematurité, si toutefoisla mortpeut surprendre
le chrétien et le sage, car G. Chaix d'Est-Ange était de ceux que
leurs hautes vertus tiennent toujours en règle avec leur conscienceet
leur foi. Ravi en quelques minutes à l'affection des siens et à la
science, alors qu'il venait lui-mêmed'accompagner un ami à sa der-
nière demeure, il présenter devant le grand Juge l'es-
a pu se avec
pérance permise hommes de bonne volonté, c'est-à-dire
aux aux
cœurs purs qui auront ici-bas soumis leur vie aux enseignements de
la parole divine et à la pratiquedes devoirs.
Si l'orgueil est le vice qui trouve le moins grâce devant le tribunal
suprême, la modestie sans doute est la vertu la plus agréable à Dieu,
la plus propre à nous assurer son contentement et sa miséricorde.
•Or, peu d'âmes ont été plus modestes que celle de G. Chaix d'Est-
Ange. On peut direqu'il voulu vivre dans constantoublide soi, de
a un
sa valeur, des services qu'il rendait à l'érudition, point
au que ses
lecteurs les plusassidusignorent peut-êtrela d'unauteurqui,
personne
prenantr/iKtto/tDn à la lettre, entendait resterignoré Amanesciri et
pro nihilo reputari Il semblequ'il eût pris à tache, le déguisant
en
1. Imitation, lib. I. cap. 2.
toute
de simples initiales, de soustraire publicité dont
sous un nom
il eût pu tirer une fierté légitime, tant par l'illustrafon de son grand-
père que par l'honneur que son propre mérite y ajoutait. Mais son
second volume était à peine paru que, déjà, L Intermédiaire des Cher-
cheurs et Curieux signalait l'importance et l'étendue de cette
«
exceptionnelleentreprise et perçaitl'anonymat de l'auleur Quel
« », «
« monument sera l'ouvrage de M. C. d'E.-A., pourquoi ne pas
nommer M. Chaix d'Est-Ange ? lorsqu'il sera achevé L'heure
« »
vient toujours qui lève les voiles. Aujourd'hui ce serait manquer à la
reconnaissance des lettrés, des chercheurs qui ont tant usé et useront
tant encore de son œuvre, de tous ceux qui en déplorent le fatal ina-
chèvement, et ce serait trahir leur unanime gratitude que de laisser
tomber sur sa mémoire le silence dans lequel il s'était enfermé.
G. Chaix d'Est-Ange a dit dans son tome IX les origines de sa
famille, brièveté qui demande quelques développements.
avec une
Issue d'une vieille souche provençale qui donna de nombreux officiers
à la sénéchaussée de Sisteron et à la Chambre des Comptesde la pro-
vince, elle prend pied dans l'histoire à la fin du xvm° siècle avec
Richard-François, né à Apt, d'abord avocat parlement d'Aix, puis
au
à Caen no, quand éclata la Révolution,il occupait une situation assez
voir élire président de l'Assemblée fédérale des dépar-
en vue pour se
tements de l'Ouest, dans leur insurrection contre la sanglante tyran-
nie de la Terreur. Cœur généreux, boucheéloquente, il parvint à tirer
des cachots de Coutances 400 victimes vouées à la mort. Il n'en fal-
lait tant alors être accusé de fédéralisme, et traîné devant
pas pour
le Tribunal révolutionnaire Incarcéré à la Conciergerie, il ne dut son
salut qu'à dramatique subterfuge raconté, 1820, à funé-
un en ses
railles, par M* Louis Caille, son confrère à la Cour Royale de Paris.
Nommé, sous le Consulat, Commissaire du Gouvernement dans
la Marne, puis Procureur Général près la Courde Reims, la nouvelle
organisationjudiciaire de 1814 le rendit à la vie privée. Il fit alors
se
inscrire au barreau de Paris, à un âge où le talent n'a plus le temps
d'imposer place notoriétés de la capitale, mais toutefois
sa aux avec
d'éclat recevoir du général Grouchy la délicate mission
assez pour
de le défendre dans le procès des proscritsde 1815. Il mourut pauvre,
et son nom sans doute eût été emporté par l'oubli qui ensevelitsi vite
les orateurs, s'il n'eût laissé héritage plus durable la fortune
un que
un fils de vingt ans, déjà inscrit au barreau, déjà fixant sur lui les
«
regards des magistrats et du public et qui devait bientôt ériger
« »
génie l'éloquence paternelle.
en
Rousse, d'une plume aussi oratoire qu'académique, dit la
M" a
vie de Gustave Chaix d'Est-Ange dans une préface magistrale en tête
de ses principauxdiscours et ce n'était pas trop d'un tel maître de
la parole pour peindre celle du maître incontesté parmi les fastes du
Palais. H fut, Berryer, la plus grande voix judiciaire du
avec
xix" siècle même vigueur, même accent, même don de pénétrer
jusqu'aux moelles mais aussi plus de pureté, plus d'élégancechâtiée,
avec ce secret, si rare aux improvisations brûlantes, de trouver d'em-
blée la forme impeccable d'une page à loisir ciselée par l'art d'un
styliste consommé.
On ne peut lire, encore aujourd'hui, les plaidoyers de Chaix d'Est-
Ange sans une sorte d'émotion contagieuse, sans se laisser gagner
au nombre, à l'harmonie, à la beauté du verbe et à la force des sen-
timents. Et cependant, où sont le geste, le trait, le souffle, la vie
enfin par quoi s'animait cette voix maintenant écrite et muette ?
M. Rousse a raison de dire que l'éloquence est à la fois le plus puis-
sant et le plus fragile des arts. Ceux-là mêmes qui l'ont portée à son
comble ravissent en mourant la moitié d'eux-mêmes à la postérité. Ils
n'offrent plus désormais qu'un intérêt rétrospectif où l'actualité les
supplante, où l'horreur, le scandale, sinon la simple curiosité,
allèchent les esprits. Parfois, c'est les trahir de les livrer
que au
lecteur, car combien peu ont reçu l'exceptionnel privilège de passer
de l'oreille aux yeux, dans une égale perfection de la plume et de la
parole? On ne lit plus Berryer on ne lit plus Chaix d'Est-Ange. Ce
sont de grands noms commis au souvenir par la gloire. Mais on ne
songe point à goûter personnellement dans leurs écrits une admira-
tion qui n'a plus d'échos.
1. Éloge funèbre, de M" Louis Caille.
Et tel est le revers des orateurs qui ont le plus remué les auditoires,
qui ont fait tressaillir les foules, de demeurer sans contact avec la
postérité. Aussi peut-on dire, dans ce sens, que le petit-fils de Chaix
d'Est-Ange, sans avoir jamais connu ni vouluconnaître la renommée,
repoussant même la plus légitime notoriété, mais laissant
en en une
journellement consultée indispensable instrument
œuvre comme un
dans la solitude des bibliothèques et des cabinets, a fait autant pour
le qu'il portait les retentissantssuccès de glorieux aïeul
nom que son
à la barre. Il ne l'apas seulement soutenu dans une vie de labeur et
de dignité, il l'a perpétué delà de la mémoire des hommes, tant
au
qu'il des érudits des chercheurs lui guidés dans
y aura sagaces, par
les sous-sols du passé.
C'est à un âge où la jeunesse sort à- peine de l'adolescence que
Chaixd'Est-Ange commençade plaider.On sait quelleépoque troublée
traversait alors la France lendemain de la Restauration. D'un
au
côté, les échappés de la guillotine rentrant d'un douloureux exil,
gros de représailles et de ressentiments; de l'autre, une opposition
disparate où les hainesjacobines coudoyaientles regrets d'une armée
licenciée, dépouillée par la paix du prestige de ses victoires et de ses
exploits. Delà d'incessants complots, politiques et militaires, traduits
devant les tribunaux. C'est l'un d'eux qui mit, à 21 ans, Chaix d'Est-
Ange en lumière, par une plaidoirie si remarquée à la Cour des
Pairs le Grand Référendaire Sémonville le vivement d'en-
que pressa
trer dans la magistrature en se chargeant de son avancement.
Mais le jeune homme était trop indépendantde caractère lier
pour
sa liberté. Il y avait déjà en lui l'avocat qui devait s'écrier un jour
Les forts et les faibles ont des droits égaux à appui; voix
« mon ma
appartient à tous etje n'appartiensà personne. Il avait d'ailleurs
« »
pris rangdans le parti libéral, avec une popularitébientôt assez grandie
pour que, en 1830, la ville de Reims, fidèle à la mémoirede son père,
l'élût député. Il entra donc dans la politique dont nature généreuse
sa
ne tarda pas éprouver l'écœurement, car il n'entendait point asservir
ses votes à des mots d'ordre parlementaires ou à d'obscures combi-
naisons de couloirs; et, bien qu'il ait gardé seize ans son mandat,
bien qu'il ait occupé souvent la tribune, ce n'est pas là qu'il faut
chercher son éloquence, mais à son banc d'avocat.
Il plaida en effet les causes les plus célèbres, avec une conception
si haute de sa dignité professionnellequ'il n'acceptajamais que celles
où il avait la convictiondu bon droit. Trois fois bâtonnier de l'Ordre
contrairement aux traditions du Palais il dut à ses fonctions
de défendre Fieschi. Ah que cela estloin de nous Mais quels exemples
et quelles leçons à ceux qui voudraient s'instruire à notre passé judi-
ciaire Quel soulagement pour notre esprit si, au sortir de ce même
prétoire où le meurtre aujourd'hui s'érige en vertu, où l'anarchie
tonitrue et fait, des assassins de tout sexe, autantde Judiths et d'Aris-
togitons, relisions le plaidoyer de Chaix d'Est-Ange faveur
nous en
de cet halluciné, instrument des Sociétés secrètes, qui avait, dans sa
vie, certains actes contraires à son horrible forfait
Fieschi est un grand criminel. Mais, si vous avez le droit de lui
«
parler de son crime, et même de son supplice, j'ai au moins le
«
droit à mon tour de lui rappeler les actions généreuses de sa vie,
«
d'apporter cette consolation à malheur, et de préparer cette
son
«
justice à sa triste mémoire. S'il doit mourir, qu'il ne marche pas
«
à la mort escorté seulement de malédictionset d'outrages,et déses-
«
pérant de la bonté de Dieu comme il a une fois désespéré de la
«
pitié des hommes.
« »
Cette élévation de l'âme et du langage, cette conscience de la
dignité humaine jusque dans la victime réclamée par l'échafaud, fut
la loi de éloquence et celui qui avait proclamé si haut les droits
son
de la défense, exigea pareillement le respect jusqu'au scrupule
en
dans l'accusation, quand il de la barre parquetdeProcureur
passa au
Général près la Cour de Paris, où l'Empire l'avait appelé 18S7.
en
Tel fut le thème ordinaire de ses discours de rentrée, de ses mercu-
riales disait autrefois, recommander juges la mise
comme on pour aux
garde contre eux-mêmes,la bienveillanceet la compassion
en
Dlus le crime est atroce, plus le péril est grand le magistrat.
pour
«
Ce n'est pas seulement contre indignation qu'il doit être
sa propre
«
garde, c'est contre le cri de la consciencepublique qui,
en encore
«
«-tout émue, juge sans savoir, condamnesans entendre, et voudrait
« renverser toutes les barrièresque la prudence oppose à ses aveugles
colères.
« Dans cette lutte qui s'engageentre le juge et l'accusé,
« le magistratn'a jamaistrop de fermeté contre les artifices.Maisaussi
« sa patience doit être à toute épreuve, sa modérationéclatante il ne
« faut pas qu'il abuse de sa parole trop facile, de sa position si pleine
d'autorité, au risque d'augmenter le trouble et les embarras d'un
«
l'audience.
« malheureux qu'intimide déjà le seul aspect de Tout
« doit être grave dans ce graveministère, et la raillerie ne doitjamais
y trouver place. C'est toujours triste spectacle celui d'un
un que
«
« malheureux qui défend, d'un coupable qui perd. La société
se se a
« le droit de le condamner; elle n'a pas le droit de l'insulter tout
« bon mot contre lui ne serait qu'une méchante action; et il me
« semble qu'ici j'ai bien le droit de rappeler magistrats cette
aux
« parole que Bossuet ne craignait pas d'adresser aux rois et aux
« princes de la terre Ne vous fiez pas à votre puissance, et qu'elle
«
« ne vous emporte jamais à des railleries insultantes, car il n'y a rien
de
plus odieux.
»
Cela se disait sous l'Empire. La démocratie, depuis, a-t-ells mieux
parlé?
Chaix d'Est-Ange, finir carrière, avait accepté siège
pour sa un au
Sénat. Mais cet enfant gâté de la vie », l'appelait M. Rousse,
comme
«
n'échappa point douleurs des deuils domestiques.Il perdit
aux succes-
sivement sa femme et sa fille, celle-ci mariée à M- Gressier, d'une
vieille famille picarde, ministre de l'Agriculture, et arrachée en pleine
jeunesse, en quelques heures, des bras de son époux désespéré, sans
que son malheureux père eût eu le temps d'accourir pour un dernier
embrassement. Elle était deux fois sienne par la chair et l'intelligence,
esprit des plus fins, des plus originaux qu'on pût connaître. Un
c
grand écrivain lui envoyait de livres cette dédicace
un ses avec
«
au grand juge. On ne se lassait point de l'entendre, et il était
«
« difficile, même aux plus forts, de lui donner la réplique »
Il lui restait plus qu'un fils qu'une mort moins fou-
ne non
droyante devait un jour emporter comme sa sœur, comme son propre
1. Univers Illustré, 25 septembre 1862.
Description:Dictionnaire historique et généalogique des familles du Poitou. On trouvera aussi . le Dictionnaire des familles nobles et notables de la Corrèze de.